Parlons-en (18) – Les copains et copines d’abord
Le journal Le Soir l’a révélé il y a quelques jours : Muriel Targnion, bourgmestre PS de Verviers et présidente de l’intercommunale Publifin – dont le nouveau nom est Enodia – vient de décrocher un mandat de « conseillère » chez Luminus. Bien entendu, ce mandat est rémunéré, en l’occurrence à hauteur de 30.000 euros par an ou peu s’en faut.
Qu’est-ce que Luminus ?
Luminus, c’est en fait le deuxième producteur d’électricité en Belgique, immédiatement après Engie-Electrabel. Toutefois, la société est active également sur le marché du gaz. Lorsqu’on examine son actionnariat – voyez la photo annexée –, on s’aperçoit que 68 pour cent de son capital sont détenus par EDF Belgium qui est elle-même une filiale à 100% d’EDF, soit Électricité de France. Cependant, à côté du géant français, majoritaire, il existe également plusieurs actionnaires minoritaires et publics tels que Publilec (26,4%), Socofe (4,7%), Ethias (0,2%) et Nethys (0,1%).
Vous direz que Nethys ne représente pas grand-chose dans cet attelage. Ce n’est pas exact, parce que Publilec est elle-même détenue à 58% par Nethys et que la Socofe, dont le siège social se situe à Liège, est également une filiale de la trop fameuse Société Anonyme dirigée, encore et toujours, par Stéphane Moreau. (En fait, le montage financier est encore plus compliqué, parce que la Socofe est directement contrôlée à 32% par Nethys et à 26% par NRB Participations, elle-même une filiale à 50% de Nethys.)
Au total, l’actionnariat minoritaire d’EDF-Luminus – soit 31% du capital – est donc entièrement entre les mains de Nethys. Aussi n’est-il pas étonnant qu’avant le déclenchement du scandale Publifin, c’est-à-dire avant 2017, on trouve parmi les administrateurs « publics » de Luminus les noms de : Stéphane Moreau (PS), André Gilles (PS) et Dominique Drion (CDH). Mais ce n’est pas tout, car un certain George Pire (MR) s’était vu gratifier d’un mandat de Conseiller, qui lui procurait pas moins de 30.000 euros par an. Pour faire quoi ? Nul ne le sait, même pas aujourd’hui…
Toujours est-il qu’on retrouvait dans le Conseil d’administration de Luminus les mêmes hommes appartenant aux trois partis traditionnels, qui furent au centre du scandale Publifin en l’année 2017.
Puis vint la tornade…
Le scandale déclenché par les révélations de Cédric Halin sur les comités de secteurs organisés par Publifin-Nethys, où des mandataires communaux s’adjugeaient de confortables émoluments sans quasiment aucune prestation correspondante, a évidemment eu ses répercussions sur l’ensemble de la galaxie Nethys et sur les revenus exorbitants de ses principaux dirigeants. Insistons sur le fait que les trois partis traditionnels (PS, CDH et MR) étaient mouillés dans cette sombre machinerie.
Naturellement, les conséquences de cette tornade devaient se faire sentir également sur EDF-Luminus. Dès le 27 avril 2017, l’AG des actionnaires d’EDF Luminus désignait trois nouveaux administrateurs, dont Melchior Wathelet (CDH), ancien Secrétaire d’État à l’énergie. Cependant, Stéphane Moreau était, pour sa part, maintenu dans sa fonction d’administrateur – tiens, comme c’est étrange !
Par contre, Drion (CDH) qui avait perdu la confiance de son propre parti, de même que Vandenbosch (PS), passaient à la trappe. Le MR Georges Pire, « conseiller » comme on l’a déjà signalé, était poliment remercié. De l’avis général, on pouvait se passer de ses « conseils ». Bref, la grande lessive, sauf que le chef d’orchestre, Stéphane Moreau, restait en place et bien en place. (Il paraît même que l’accord PS-MR à la ville de Liège contient une clause secrète portant sur l’immunité du sieur Stéphane Moreau.) Plus question d’offrir un nouveau mandat de conseiller à qui que ce soit.
Tout était donc rentré dans l’ordre, à l’exception de cette fin du mois de juin 2019, lorsque Muriel Targnion, Bourgmestre de Verviers et présidente de Publifin, se vit attribuer ce beau cadeau de conseillère avec à peu près 30.000 euros annuellement à la clé. A-t-elle des compétences particulières en énergie ? Absolument pas. En fait, il ne s’agit pour elle que d’arrondir ses fins de mois, sans grand effort supplémentaire. Bref, cela rappelle furieusement les comités de secteur et leurs énormes abus.
Il faut quand même souligner un « détail » qui a toute son importance : la nomination de Targnion a été soumise au conseil d’administration en dernière minute par Stéphane Moreau lui-même. La procédure était tellement expéditive et manipulée que l’administrateur CDH Melchior Wathelet a remis immédiatement sa démission.
Rien appris, rien retenu
Même au plus haut niveau du PS, l’attitude de la « parvenue » de Verviers passe mal. Ainsi le sujet a été évoqué lors d’un bureau du parti le vendredi 5 juillet. Elio Di Rupo, affirme André Frédéric, échevin à Theux et député fédéral, aurait déclaré que« cette nomination était inacceptable et inopportune. »
L’intéressée, elle, s’estime victime d’une cabale. Elle n’a rien fait d’illégal, puisque, dit-elle, Luminus n’est pas une intercommunale. Elle ajoute même qu’elle compte solliciter un poste d’administratrice plutôt que de conseillère chez Luminus.
Vraiment, Muriel Targnion et pas mal d’autres au PS n’ont rien retenu de l’affaire Publifin. Les copains et copines d’abord !
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